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« 2006 | Accueil | Libération, quid du projet de la direction? »

Commentaires

joel ronez

Point de vue trés intéressant, que j'essaie en vain d'expliquer chaque fois que j'ai un journaliste déprimé sous la main.

Certains journaux se posent actuellement la question de la vocation de leur site web, quelle complémentarité, etc...

Mais ils se trompent de question. C'est plutôt la question centrale de leur propre place sur le marché qui reste à redéfinir. Le web est un mode distribution qu'il faut certes inclure dans la réflexion, mais il ne façonne pas la ligne éditoriale. Il la promeut.

Quelle est la valeur ajoutée de Libé quand il relate un fait déjà connu de tous depuis la veille (Angelina Jolie est enceinte, fil insolite de l'AFP, fait divers copié/ collé d'une agence). Ces médias n'ont pas vu que l'AFP n'était plus diffusé que chez eux, mais sur tous les portails, mobiles et flux qui abreuvent GRATUITEMENT leurs lecteurs avant qu'eux les touchent.

Si j'achète Libé ou le Monde, c'est que j'attend de leur part un traitement différencié, avec du recul, de l'analyse.

Au lieu de chercher des sources alternatives, de diversifier les points de vue, les modes de livraisons, les infographie, etc... la presse cherche à courrir après ses nouveaux concurrents (nanopublications, portails, ...)

Les journaux en sont encore à s'expliquer à eux même le sens du mot "bi-média", alors qu'ils devraient plutôt s'expliquer le sens de valeur ajoutée.

> Dernière remarque sur le magazine MEDIAS dont tu parles. A part cette interview sur le canard et Charlie, j'ai trouvé ce journal horriblement indigent (que viens faire l'itw de la nana de Berlutti la dedans ?). Que pense-tu de ce journal ?

Danielle

Merci de soutenir ce point de vue, forgée par l'analyse plus que par une pratique d'"insider".

Concernant le magazine Médias, je me suis abonnée après avoir acheté le 1er numéro, que j'ai trouvé innovant et riche. Cela faisait longtemps que je n'avais pas eu envie de lire un magazine de bout en bout, avec le souci de ne pas en perdre une miette.

Il est vrai que certains choix éditoriaux au fur et à mesure des numéros peuvent questionner. On se demande en effet que viennent faire les gens de Berlutti, ou encore une diva et ce que cela peut nous apprendre dans notre rapport aux médias (ou dans le leur d'ailleurs).

Cela dit, il reste que l'essentiel est dynamique (interviews), bien écrit et donne de la profondeur (par ex, éclairages historiques de P. Eveno). A suivre donc, en espérant que la qualité d'ensemble se maintienne.

luis ivars

Bonjour
et merci pour cette analyse sur l'attente des lecteurs en matière de "valeur ajoutée" que j'appelle de l'information. Mais je crois que les journaux sont aujourd'hui pris de vitesse. Les moyens techniques permettent de transmettre des informations en temps réel. L'internaute, l'auditeur, le téléspectateur ou l'auditeur que nous sommes est informé avant le lecteur du journal. Alors oui le on line peut être utile. Pour plus de profondeur, d'analyse, de mise en perspective, le support papier serait plus adapté. Encore que pourquoi ne pas imaginer que justement tout ce travail d'approfondissement soit conservé et accessible par la suite sur le web - ou doit-on considérer que c'est le média de la vitesse, de l'éphémère sur lequel la mémoire et la connaissance n'ont pas leur place. Mais là se pose à mon avis une autre question : pensez-vous qu'avec des équipes réduites (bonne gestion de l'entreprise oblige) il soit possible de mener de front un travail de la spontanéité (le flux quotidien de l'information) et une démarche d'enquête et de dossier (avec sources pertinentes alternatives) ?
Etant moi même journaliste je vois les choses un peu de l'intérieur. D'où peut-être ma question.

Danielle

Je veux bien vous répondre, encore une fois avec un parti pris qui ne naît pas de l'expérience du journalisme. Je m'excuse également par avance pour les sources d'information qui m'aident à vous répondre, qui sont essentiellement des écrits et des déclarations de Bruno Patino du Monde Interactif.
En effet, dans son livre écrit avec JF Fogiel, 'La presse sans Gutenberg', il décrit le fonctionnement de la rédaction Internet du Monde. Visiblement, il y aurait une partie des journalistes qui s'occupent en effet de gérer l'information sur le vif et une autre partie de la rédaction davantage attachée à des sujets d'investigation.
Par ailleurs, dans une des interviews suite à la parution du dit livre, sur France Culture je crois, il aurait avancé ce chiffre fort intéressant : 85% des contenus désormais consultés en ligne par les internautes sont produits par la rédaction du Monde.fr. Ces dernières années ont donc vu un renversement du type d'informations que les lecteurs de l'édition interactive souhaitaient obtenir en ligne.

Je trouve que ces faits éclairent un peu la question que vous posez. Il me paraît un peu vain de suivre le rythme de publication des agences. Un titre qui veut produire de la qualité n'a pas à se trouver à la remorque de Yahoo News. Ce qu'ils font est très bien. Avoir le fil de dépêches sur son propre site aussi, de manière à pouvoir assouvir le besoin d'infos sur le vif. Mais concernant le travail de la rédaction, il devrait être complémentaire. Pour accompagner cette information brute, les journalistes peuvent produire des interviews audios ou vidéos, des animations, lancer des chats, etc. Bref, trouver une manière d'éclairer l'info par des outils propres au web.
Quant au travail d'analyse et de recul, à mon sens, il concerne les articles publiés à la fois sur le titre papier et sur le web. Reste peut-être encore la question du bon format de lecture qui ne peut être celui du papier plaqué en ligne, mais les sites des grands médias sont ceux sur lesquels les internautes passent le plus de temps. C'est donc qu'ils viennent y chercher une information qui va plus loin qu'ailleurs...

Benoît Raphaël (numérodeux)

J'ai bien aimé votre post, j'y reviens d'ailleurs sur mon blog aujourd'hui (http://www.20six.fr/numero2/). A l'heure où tout le monde parle de révolution, il ouvre le débat sur le fond de notre métier. On s'interroge encore beaucoup trop sur la forme et sur les outils. Papier ou web, peu importe. L'essentiel c'est notre capacité à être utile au lecteur, à l'interpeller, le surprendre et à révéler.

Un petit bémol, par contre, sur cette mission de complémentarité de la presse écrite. C'est une vieille idée, un peu dépassée, à mon avis. L'info complémentaire, l'éclairage, le lecteur peut les trouver sur le Net aujourd'hui. On assiste d'ailleurs, depuis quelques mois, à un renversement de la place de la presse écrite au profit du Net, plus interactif, plus ouvert, plus démocratique...
Les éditoriaux des grands journaux, les pages d'analyse du monde, ne m'éclairent pas plus aujourd'hui que certains blogs de spécialistes.
Je crois que la presse écrite doit sérieusement se remettre en cause aujourd'hui. Et je vois très peu de titres opérer cette remise en question: en quoi sommes nous utiles ?
Qu'apportons nous de plus ?
Il y a un total décalage entre les médias traditionnels et la société. Les chiffres en chute libre l'attestent.

Danielle

Merci Benoît pour votre réaction. J'ai lu votre post il y a quelques jours, mais je n'arrive plus à le retrouver sur votre blog depuis...
La complémentarité est-elle une approche rebattue ? Peut-être, mais il ne semble pas qu'entre le concept et son application, les titres aient tous fait des étincelles. Si la complémentarité existe sur le Net plus que sur le papier, c'est que certains journaux sont passés à côté. Cela dit, ils peuvent encore "maîtriser l'agenda" des discussions (comme le suggérait Gillmor lui-même, http://dangillmor.typepad.com/dan_gillmor_on_grassroots/2005/02/where_newspaper.html#comments ), grâce à leur marque et à la reconnaissance que même les blogueurs accordent encore à leurs rédactions (cf chiffres de Technorati montrant les grands titres de la presse américaine en tête des liens effectués par les blogueurs).

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